5e recommandation clé
Les pays d’origine et de destination devraient concevoir des procédures de règlement des différends et des voies de recours qui tiennent compte du déséquilibre de pouvoir entre les employeurs et les agents de recrutement, d’une part, et les travailleurs migrants, d’autre part.
Mal conçus et peu appliqués, les processus de règlement des différends avec des recruteurs et des employeurs présentent de nombreux problèmes pratiques pour les travailleurs migrants, qui sont souvent amenés à accepter un règlement à l’amiable leur accordant une fraction seulement du montant qui leur est dû et qu’ils pourraient raisonnablement obtenir au titre de dommages et intérêts. La dynamique de pouvoir entre recruteurs/employeurs et migrants peut jouer si fort contre le/la migrant·e que le concept de règlement à l’amiable n’est alors pas réaliste. Il est particulièrement difficile pour les migrants de se confronter à leur employeur, du fait qu’il contrôle leur situation au regard de la législation sur l’immigration. Pour les travailleurs et travailleuses domestiques, isolés au domicile de leur employeur, il est presque impossible de porter plainte sans quitter cet employeur et risquer de rendre leur situation irrégulière. Si un migrant ou une migrante refuse d’accepter ce qui lui est offert (le cas échéant) lors d’une procédure de médiation, l’employeur ou le recruteur sait que ce travailleur n’a d’autre option que d’entreprendre une action en justice généralement longue et difficile, ce qui réduit considérablement sa marge d’action. Dans ce cas, les migrants se retrouvent alors à attendre, éventuellement sans revenus ou sans papiers, la fin d’une procédure à l’issue incertaine.
Les États d’origine comme les États de destination doivent concevoir des procédures de règlement des différends et des voies de recours qui tiennent compte de la réalité de la situation des travailleurs migrants et qui y soient adaptées. Ils devraient instaurer des mécanismes offrant un recours simple et rapide, lorsque les cas sont simples. Dans les États de destination, les mécanismes de règlement des différends doivent fournir aux travailleurs des moyens simples de sécuriser leur situation au regard de la législation sur l’immigration et éventuellement leur permettre de trouver un nouvel emploi pour la durée de la procédure. Les gouvernements devraient également se pencher sur l’utilisation possible des technologies pour surmonter les obstacles géographiques qui peuvent empêcher les travailleurs retournés dans leur pays d’entreprendre des poursuites contre leur employeur. Ils devraient également ouvrir des bureaux régionaux pour y recevoir et traiter les plaintes, au lieu d’obliger les travailleurs à traverser tout un pays pour déposer plainte dans la capitale.
5.1. Mettre en place des processus simples et clairs de règlement des différends et étudier la possibilité d’introduire une procédure accélérée pour tenir compte de la vulnérabilité particulière des travailleurs migrants en cas de lenteurs et de ses conséquences sur leur capacité à entreprendre un recours.
5.2. Si des procédures de médiation gérées par l’État existent déjà, désigner des médiateurs ou médiatrices compétents, formés et impartiaux. Veiller à ce qu’aucune association d’employeurs ou d’agences de recrutement n’intervienne dans l’administration ou le financement des procédures de médiation.
5.3. Veiller à ce que les travailleurs migrants, y compris les travailleurs en situation irrégulière, aient droit à un conseil juridique au financement suffisant dans les affaires relevant du droit du travail contre des employeurs et des recruteurs, et à ce qu’ils aient accès à des services d’aide juridique.
5.4. Veiller – dans les pays de destination – à ce que la situation irrégulière des travailleurs migrants ne soit pas communiquée aux autorités lorsqu’ils entament une procédure de recours.
5.5. Instaurer des mécanismes pour faciliter le dépôt de plaintes anonymes.
5.6. Mettre à disposition suffisamment de structures d’accueil permanent pour que les travailleurs et travailleuses domestiques ou les aides familiaux et aides familiales résidant chez l’employeur puissent quitter leur employeur pour déposer plainte en toute sécurité.
5.7. Étudier la possibilité d’utiliser des outils vidéo et d’autres mécanismes coopératifs pour que les travailleurs de retour dans leur pays d’origine aient accès aux mécanismes judiciaires et non judiciaires de règlement des différends dans les États de destination.