Mexique - Canada: Liberté d’association
La législation mexicaine protège le droit à la liberté d’association, mais la percée de syndicats actifs et indépendants a été entravée par les conseils tripartites de conciliation et d’arbitrage (CCA), qui servent de remparts, dans les faits, contre les grèves des syndicats. Depuis longtemps, les CCA sont accusés de favoriser un contrôle non démocratique du lieu de travail, notamment par la mise en place et la défense de « syndicats de protection » en phase avec l’employeur, qui représentent environ 90 % des travailleurs syndiqués du pays, selon les estimations. Ces syndicats concluent des conventions collectives presque sans participation véritable des travailleurs, parfois avant même l’ouverture des usines. Les gouvernements ont toléré ces dispositifs, qui bénéficient de l’appui des entreprises, car ils préservent la « compétitivité » des salaires. En 2019, le gouvernement a introduit d’importantes réformes du travail afin de remédier à ces problèmes, en amont de la ratification de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM), en 2020. Il sera primordial de suivre la mise en œuvre de ces changements, et tout impact qu’ils pourront avoir sur les travailleurs migrants. Dans ce contexte, certains travailleurs ont recours à la grève pour protester contre la volonté de leur syndicat. Les militants indépendants pour les droits du travail se heurtent à un environnement hostile, où les menaces et les violences ne sont pas rares. L’administration actuelle a prévu une réforme du travail qui améliorera, selon elle, la participation démocratique au sein des syndicats et la négociation collective, mais compte tenu du contexte, il n’est pas surprenant que les syndicats mexicains ne soient pas intervenus à ce jour en faveur des droits des travailleurs migrants mexicains dans le cycle du recrutement. Par ailleurs, les autorités mexicaines ont déjà supprimé à plusieurs reprises des organisations de travailleurs migrants au Canada. Au début des années 2010, un tribunal de Colombie-Britannique a déclaré le consulat du Mexique à Vancouver coupable d’« ingérence abusive », après avoir constaté son soutien aux efforts d’une entreprise canadienne visant à contrecarrer la syndicalisation. Ces dernières années, le gouvernement a toutefois cherché à travailler plus étroitement avec le syndicat des Travailleurs unis de l’alimentation et du commerce (TUAC), qui représente les travailleurs agricoles, afin de collaborer aux efforts de renforcement de la proportion des femmes dans le PTAS et d’améliorer les protections des travailleurs migrants, notamment pendant la pandémie de COVID-19.
Le Canada dispose de syndicats actifs, dont beaucoup ont cherché à accroître la représentation des travailleurs migrants en leur sein avec l’augmentation du nombre de travailleurs temporaires dans les années 2000 et 2010 – plusieurs initiatives positives de ces syndicats ont eu des résultats bénéfiques pour les travailleurs migrants, comme une nouvelle législation ou des programmes conjoints avec des organismes publics. Dans les provinces et les secteurs où les travailleurs ont le droit de se syndiquer, les travailleurs migrants sont couverts par les dispositions des conventions collectives négociées par les syndicats, une fois arrivés au Canada. Qui plus est, les syndicats de secteurs tels que le conditionnement de la viande et la construction ont travaillé avec les employeurs pour mettre en œuvre des modifications de leurs conventions collectives, ainsi qu’avec l’administration pour traiter des questions d’intérêt pour les travailleurs migrants, à savoir, notamment, faciliter leur obtention du permis de résidence permanente et leur offrir des cours de langue. Néanmoins, la possibilité pour les travailleurs migrants du Canada de s’affilier à des syndicats dépend de la province et du secteur où ils travaillent. Fait important pour le corridor Mexique-Canada, il est absolument impossible pour les travailleurs agricoles de l’Ontario et de l’Alberta de s’unir à des syndicats, tandis que d’autres provinces limitent lourdement le droit à la liberté d’association. Un comité d’experts de l’OIT a blâmé le Canada pour avoir enfreint le droit des travailleurs migrants à la liberté d’association en Ontario, mais une action en justice intentée par le TUAC, qui représente les travailleurs agricoles du Canada, contre cette interdiction a été rejetée par la Cour suprême du Canada en 2011. L’OIT a maintenu sa position au sujet de cette restriction juridique, que les syndicats canadiens considèrent comme un facteur très néfaste pour la protection des travailleurs agricoles, avec le permis de travail fermé. À l’échelle politique, la réunion annuelle de bilan du PTAS organisée entre les deux gouvernements et les employeurs canadiens ne comporte pas de mécanisme permettant aux travailleurs migrants, aux organisations de travailleurs ou aux syndicats d’apporter directement leur contribution. Les employeurs estiment que, compte tenu du fait que les travailleurs agricoles ne sont pas syndiqués, les syndicats canadiens n’ont pas leur place pour les représenter.
Recommandation aux gouvernements mexicain et canadien:
- Permettre aux travailleurs d’être représentés aux réunions annuelles du PTAS et d’y participer, conformément aux orientations de l’OIT sur les accords bilatéraux.
Recommandation aux provinces et territoires du Canada:
- Éliminer les restrictions à la liberté d’association qui empêchent les travailleurs, migrants ou autres, d’exercer leur droit légitime de fonder des syndicats ou d’y adhérer.